NOËMIE DE SAVANNE
Les Écossais viennent de produire leur premier vin, il n’y a plus seulement le whisky, dont ils produisent 1,5 million d’hectolitres/ an (Champagne: 2,5).
Enfin « les » Ecossais… un seul restaurateur de Perthshire, au centre-est du pays : il y a quatre ans, il a planté 48 pieds de bacchus et de madeleine angevine au fond de son jardin et sert aujourd’hui son « riesling » au verre. Il compte en replanter 800 pieds « de cépages qui vont bien et si le climat le permet » dit-il au Daily Telegraph. Quelques vignes existaient au nord-ouest de l’Écosse dans l’île Lewis des Hébrides, plantées sur un sol de gneiss, granite et basalte.
Les Anglais, eux, avec plus de 400 vignobles sur 1 100 ha (45% d’augmentation en 4 ans), produisent déjà 3 millions de bouteilles, mais c’est loin d’être suffisant, ils en importent cent fois plus! De gros buveurs, de « sparkling » national notamment. Celui de Nyetimber Classic Cuvée 2003 vient de remporter le 1er prix du concours international des effervescents « Bollicine (bulles) del mondo » à Vérone. Il provient du Sussex au sud de l’Angleterre, précisément de West Chiltington. Et c’est bon. Ce n’est d’ailleurs pas le premier effervescent anglais à se voir primé. Selon le lauréat, classé au-dessus des Bollinger, Pommery et autres Roederer, la qualité de son vin « au parfum de haies et de pommes (Egremont Russet, Bulbés Russet, George Neal…) par un après-midi d’automne » vient de celle du raisin, dûe elle-même au climat devenu plus favorable.
Il fait chaud, on est bien je vous dis… (voir post du 25 novembre)
Avec cet humour qu’on leur connaît, qui tient sans doute à la typicité de leur terroir, la responsable des English Wine Producers Julie Trustram Eve, reconnaît que le vin anglais profite du réchauffement climatique perçu ailleurs comme catastrophe mondiale. Elle pense aussi qu’au sud de l’Angleterre, qui va bénéficier sous 10 ans du climat actuel de la Loire Valley et dans 20 ans de celui du bordelais, il est plausible que le climat sera devenu trop chaud pour la vigne à la fin du siècle, « vers 2080 » précise-t-elle.
En attendant, notre belle et bonne liane continue de progresser vers le nord — son cycle végétatif se raccourcit, les grains gagnent en sucre, les maturités s’améliorent, l’acidité se modère, les fermentations libèrent un nombre plus grand d’arômes et aussi plus d’alcool (+ 2° dans les vignobles d’Europe en trois-quatre décennies, avec un 17° record en Espagne).
Des pépiniéristes allemands spécialisés en plants de vigne les vendent en… Scandinavie et en Pologne. L’État suédois a créé un conseil viticole. Des Danois viennent à Bordeaux pour se former et se préparer.
Les climatologues ont observé que les épisodes de froid rédhibitoire sont moins nombreux et aussi que la précocité du cycle végétatif peut rendre les vignes plantées au nord de l’Europe plus sensibles aux gelées de bourgeons. Dans certains pays nordiques, le manque de soleil peut poser des problèmes, et l’humidité présenter un risque : la vigne a besoin de stress hydrique pendant la maturation des grains, même modéré.