NOËMIE DE SAVANNE
Rien à voir avec le libelle de C. F. Mercier de Compiègne*, non, non. Ce n’est pas le pet que vous croyez. Il s’agit de l’abréviation de « Poly-Éthylène-Téréphtalate », le plastique utilisé pour les bouteilles (1). Une question se pose à ma conscience féminine, qui est aigüe : pourquoi le plastique utilisé pour les biberons des bébés (2) ne conviendrait pas au vin de leurs parents ? Bon pour l’eau minérale (phénomène bien français… on ferait mieux de boire l’eau du robinet), les sodas, l’huile, le vinaigre, etc., et pas pour les vins ?
Le vin devrait-il continuer à « mériter mieux » que le plastique ? Plus si sûr. Le contenant plastique est recyclable (c’est nouveau, moi qui croyais qu’il fallait des années), permet le bouchon à vis (autre faux problème bien français, car c’est le meilleur moyen de supprimer le goût de bouchon, qui contamine environ 1 bouteille sur 10) et ne pèse qu’une cinquantaine de grammes contre 500 à 700 g pour le contenant verre — d’où des économies globales d’énergie en transport (900 cols par palette contre 600 avec les bouteilles verre) et une réduction d’environ 20% des émissions de CO2.
Et il offre le même aspect — on voit la couleur à travers, ce n’est pas de la canette alu. Et surtout, le PET est « inerte » (sans activité physico-chimique, ne provoquant pas de nuisances), et n’altère pas le goût du vin, plusieurs études convergentes l’ont montré, ni dit-on n’empêche son évolution, mais cela reste à vérifier, trop tôt pour le savoir. Le plastique protège aussi des UV et reste hermétique à l’oxygène. Quelques exemples :
— À gauche, la bouteille de Bilyara (mot aborigène pour Eaglehawk) de l’australien Wolf Blass, qui a commencé à distribuer ses bouteilles PET au Canada (Ontario) dès 2006. Commercialisation désormais aussi en Australie : 1 blanc et 1 CS/Syrah à 17 $ australiens (9,50 €)
— À droite, la cuvée sauvignon Destinéa de Joseph Mellot à Sancerre, distribuée en Europe du Nord.
— La gamme Bordeaux de Chamarré — Premium (4,70 €/b chez Monoprix), Tradition et Bordeaux, est en PET multi-couches (feuille de nylon entre 2 couches de PET) qui garantit une meilleure étanchéité (un an de conservation contre 6 mois avec la 1ère génération). Capsule à vis, en plastique également. Poids/b : 54 g, 85% de moins qu’une en verre (voir article Jacques Berthomeau).
Du vin en bag-in-box et pas en bouteille plastique ?
Quand j’étais petite en France, mes grands parents achetaient parfois du vin dans des litres en plastique (ou des litres 1/2, mais ils n’auraient pas dit « magnum »), du Granvillons (« grand vin Damoy »), du Vin des Rochers (« velours de l’estomac », quand on enlevait la capsule, on trouvait un point-cadeau); et il y avait les Postillon, Cellier des Papes, Margnat, Préfontaine (dont le slogan était je crois « Je boirai ton vin car c’est le meilleur ! »).
Je ne vais pas vous faire un plaidoyer proustien, simplement j’essaie d’être raisonnable, moi qui suis amateu-reuh déterminée de vin bio, je ne dis pas « naturel », ça ne signifie pas grand-chose, le vin n’est pas que la vigne; et la notion de terroir ne s’applique pas au raisin de table, ce sont les hommes et les femmes qui font le vin et pas la nature toute seule évidemment : c’est une fois fermenté-transformé qu’il transmet la minéralité — hommes et femmes d’ailleurs transformés eux-mêmes par le vin qu’ils transforment, mais on parlera de ça plus tard.
Mais branchée bio, je veux boire le vin des vignerons qui comme les autres travailleurs de la terre sur la planète, ont pris conscience de leur relation conjugale avec la nature, avec leur terroir, et pratiquent l’écologie comme on respire. En France, ça n’en fait pas beaucoup : on cultive le raisin bio (il n’existe pas d’appellation « vin bio ») sur environ 1,4% des exploitations (+ ou – 1 500). Le bio commence en début de chaîne, sur la plante — pesticides, insecticides, bactéricides et phytosanitaires réduits au minimum, conduite raisonnée de la vigne, et pratiques saines tout au long de la fabrication et de l’élevage. Le bio man angevin Mark Angéli (La Sansonnière) conseille : « Quand vous rencontrez un confrère, demandez-lui ce qu’il emploie comme produits chimiques et s’il ajoute du sucre, et vous saurez. ».
Ce n’est qu’à la fin de la chaîne qu’intervient le contenant. Et le plastique, on en a pris l’habitude en achetant notre vin en bag-in-box 5 ou 10 litres dans les Coopé (de mieux en mieux les vins de Coopé, autre sujet à traiter), pas d’odeur de bouchon, garde sous vide 2-3 mois sans problème.
Alors messieurs, un problème avec le PET ? D’odeur par exemple ? Ça ne sent rien. D’aspect ? Les bouteilles ont le même look, juste un peu plus courtes. De toucher ? Vous ne dévissez jamais votre bouteille de jus d’orange vous-même ? De poids ? Elles sont plus légères, et de toute façon c’est moi qui les mets dans le caddie. De goût ? Là on entre un peu dans la folie : c’est le vin, l’appréciation, le goût qui changent et ce n’est pas le contenant qui en est la cause. Les verriers au chômage ? Mais il y a pénurie (organisée ?) de bouteilles due à la concentration des fournisseurs, et hausse des prix.
Pour moi, pas de doute : le PET sera entendu.
NdS
(1) Le contenant plastique comprend deux polymères : celui du corps de la bouteille, transparent et léger, le PET donc; et celui du bouchon, opaque et résistant, le « Polyéthylène haute densité » ou PEHD.
(2) D’ailleurs le plastique des biberons est en polycarbonate, diffusant quand il est chauffé, du bisphénol A ou bpA (œstrogène synthétique qui pourrait causer un dérèglement hormonal et être à l’origine du cancer du sein et de la prostate, de la puberté précoce chez les filles, d’un déficit de l’attention et de l’hyperactivité, de l’obésité, rien que ça ! Ah la la mes enfants !). Bien que les doses de bpA relevées soient inférieures aux minima autorisés, les Canadiens envisageraient de l’interdire (pour les biberons). Rassurez-vous donc, on ne chauffe pas le vin comme le lait, et la bouteille n’est pas en polycarbonate mais bien en PET.
ADDENDUM SUR LE (vrai) PET
ÉLOGE DU PET — Dissertation historique, anatomique et philosophique, sur son origine, son antiquité, ses vertus, sa figure, les honneurs qu’on lui a rendus chez les peuples anciens, et les facéties auxquelles il a donné lieu.
Par Claude-François Xavier Mercier de Compiègne, publié en 1799 (An VII de la Liberté).
Traités, notes, poèmes, lettres en 47 chapitres dont Musique et éloquence du pet; Droits féodaux payés par un pet; Apothéose du pet chez les Égyptiens; Procédés pour mesurer un pet; Le pet français et le pet béni; Le pet et le politique; etc.
Extrait de la préface de l’édition originale : « Comme il n’est pas possible de tirer autant d’exemplaires de cet ouvrage qu’il y a de péteurs sur la surface du globe, je me suis restreint au petit nombre qui veulent rire et sont curieux d’ouvrages gais et rares. Il n’a donc été tiré qu’à mille exemplaires. » (Mercier, littérateur porté sur l’érotisme, en était l’éditeur).
Réédition genre fac simile en 2000 aux Éditions Apolline, 131 p.
À noter aussi :
L’ART DE PÉTER — Essai théorico-physique et méthodique à l’usage des personnes constipées, des personnes graves et austères, des dames mélancoliques et de tous ceux qui restent esclaves du préjugé.
Par Pierre-Thomas-Nicolas Hurtaut, paru en 1751. Dix chapitres dont Des divisions du pet (plénivocal ou grand pet, pet diphtongue [pa pa pax, pa pa pa pax, pa pa pa pa pax], semi-vocal ou petit pet); Les pets sont-ils de la musique? ; Avantages des pets pour la société; Quelques pets plaisants (pets de province, de maîtres en faits d’armes, de boulangers, de cocus, …); Histoire du prince Pet-en-l’air et de la reine des Amazones. Au-delà des descriptions et qualificatifs détaillés, il développe l’idée que le pet remet les gens à leur place quand, bien et lâché au bon moment dans un dîner, il « arrête tout court un babil assassin et le plus ennuyeux du monde, déride les graves, fait rire les misanthropes, égaye enfin les esprits. »
Hurtaut s’inscrit dans la tradition des observateurs du crepitus ventris, depuis Cicéron, Suétone, Horace, Aristophane jusqu’à Rabelais. Il a écrit par ailleurs plus d’une dizaine d’ouvrages dont Coup d’œil anglais sur les cérémonies du mariage, et un Dictionnaire Historique de la Ville de Paris et de ses environs en 4 volumes (en collaboration avec Magny).
Préface de 25 pages d’Antoine de Baecque sur la littérature parue sur le sujet, abondante et variée – plus d’une quarantaine d’ouvrages au XVIIIème en France jusqu’aux contributions sur les odeurs et excréments –, de Roland Barthes, Norbert Elias à Dominique Laporte et Alain Corbin, etc.
Réédition Payot & Rivages en 2006, 110 p.
Et encore :
DICTIONNAIRE ILLUSTRÉ DU PET
Au moyen d’écrits, témoignages et représentations d’écrivains, poètes, chansonniers, dessinateurs, médecins, politiques, militaires et humoristes dans le vent (!), de l’Antiquité à Rabelais jusqu’à notre époque, illustrés par de nombreuses cartes postales fin XIXème – début XXème, l’auteur s’efforce de démontrer que le pet – ode à la vie – est loin d’avoir été occulté au cours de l’Histoire comme il l’est aujourd’hui dans les rapports sociaux.
Editions Horay, collection Cabinet (?) de curiosités, édité en mars 2008. 330 p.
SONNERIES DE FLATULENCES
Apple propose comme sonneries d’iPhone et iTunes une trentaine de bruits de pet téléchargeables. Pour le seul jour de Noël 2008, le montant des achats de pets sonnants s’est élevé à 30 000 $ aux USA.
FARTS REVEALED
9’30 d’explications sur You Tube (en anglais) par une jeune Américaine documentée et décomplexée, apparaissant en gros plan (d’abord de son derrière comme il se doit, puis de son visage qu’elle a fort joli), qui disserte sur les diverses appellations du pet Outre-Atlantique et rejoint les auteurs cités plus haut sur la nécessité d’en parler et de savoir en RIRE : c’est un moderne ÉLOGE DU PET.
DNA : Le vin bio gagne des arpents. Une trentaine de vignerons alsaciens respectueux de l’environnement ont font découvrir au public leurs vins issus de la viticulture biologique le 1er mai au château de Kientzheim : « aujourd’hui, plus de 10% du vignoble alsacien sont en bio ou biodynamie. En 2007, cela représentait 1 018 ha, soit 110 exploitations y compris celles en reconversion », souligne William Mairesse, chef de projet de structuration de filière à l’Organisation Professionnelle de l’Agriculture Biologique.
From Tom Avril, The Philadelphia Enquirer, Mon, Jun. 8, 2009
Long dismissed by certain purists, boxed wine is now getting a thumbs-up, of sorts, from the realm of science.
According to a new study, one type of cardboard packaging is better than any cork or screw-cap when it comes to reducing an unpleasant « green » taste that strikes some wines. This taste may come from one of two sources, said Gary J. Pickering, a professor of wine science at Brock University in Ontario and senior author of the study in the Journal of Agricultural and Food Chemistry.
Either the wine was made from unripe grapes, or the grapes were infested with a species of ladybug. For some reason the researchers can’t explain, wines stored in Tetra Pak-brand cartons had the lowest levels of these unwanted chemicals, called methoxypyrazines.
One possibility, Pickering said, is that the chemicals escape through the carton’s innermost layer, made of polyethylene, and then attach to an adjacent layer made of aluminum foil.
On the downside, the boxes were not so good at preserving wine from oxidation over long periods, said Pickering.
The best storage method for preventing that problem, the study found, was a bottle sealed with a screw-cap – which, like the cardboard carton, has some connoisseurs wrinkling their refined noses.
Pickering says perhaps there is some hybrid approach that will borrow the best elements of each wine-storage method.
The benefit of using cartons was a surprise to one winemaster, who works for a member of a trade group that helped fund the study.
« I personally am not a fan » of boxes, says Marc Bradshaw, of Pillitteri Estates Winery in Ontario. « I like to think of myself as more of a traditionalist. »
Yet even Bradshaw started using screw-caps on a few of the vineyard’s wines last year. The reaction? « There was somewhat of a backlash, » he says.